Nouvelle zone du plan de secteur, introduite par le CoDT, la Zone d’Enjeu Communal (ZEC) a été très largement citée, depuis le début de sa législature, par le Ministre en charge de l’aménagement du Territoire, comme étant l’une des solutions à mettre en œuvre pour contrer l’étalement urbain et réduire l’artificialisation des sols en Wallonie : après avoir abordé l’idée dans de nombreuses interviews, le Ministre a même confirmé, en séance du Parlement wallon du 12/11/2019, son intention d’encourager, dans les prochains mois, la définition et la mise en œuvre d’une vingtaine de ZEC.

Mais la ZEC, késako ?

Objectifs et philosophie

C’est l’article D.II.35 du CoDT qui introduit cette nouvelle zone urbanisable :

« (…) destinée à accueillir de manière indifférenciée la résidence, les activités d’artisanat, de service, de distribution, de recherche ou de petite industrie, les établissements socioculturels, les constructions et aménagements de services publics et d’équipements communautaires ainsi que les équipements touristiques ou récréatifs. Cette zone doit aussi accueillir des espaces verts publics et un réseau de mobilité douce. Les activités existantes non visées à l’alinéa 1er peuvent s’y maintenir et s’y développer ».

Il s’agit donc d’une zone destinée à favoriser la mixité de fonctions. Hormis les activités industrielles ou extractives, on peut y retrouver tous les types de fonctions.

Mais cet article seul n’est pas suffisant pour appréhender les objectifs de la ZEC, et surtout sa localisation. En précisant les conditions liées à l’inscription d’une telle zone au plan de secteur, l’article D.II.45, §5, alinéa 1 permet de mieux comprendre les perspectives d’application de la ZEC. Ainsi :

« L’inscription d’une zone d’enjeu communal vise une partie du territoire qui contribue à la dynamisation des pôles urbains et ruraux et dont le potentiel de centralité, caractérisé par une concentration en logements et par un accès aisé aux services et aux équipements, est à renforcer par une densification appropriée, par le renouvellement, par la mixité fonctionnelle et sociale et par l’amélioration du cadre de vie ».

Si les notions et concepts employés dans cet article demanderaient davantage de précision, voire à être définis dans le Code, on comprend que la ZEC est un outil de renforcement ou de (re)dynamisation d’une centralité. Que celle-ci soit urbaine ou rurale. Une même commune pourrait d’ailleurs accueillir plusieurs ZEC.

A l’heure actuelle, néanmoins, les exemples de ZEC sont rares puisqu’aucune n’a encore été approuvée.

Procédure

L’une des singularités de la ZEC est qu’elle permet de « court-circuiter » les éléments réglementaires des plans de secteur (tant, bien sûr, que sont rencontrées les conditions de l’article D.II.45,§5 !). L’inscription d’une ZEC s’apparente donc à une procédure de révision du plan de secteur, telle que régie par l’article D.II.44. D’initiative communale, la ZEC nécessite donc la réalisation d’un dossier de base et d’un Rapport sur les Incidences Environnementales (RIE) qui doivent être approuvés par le Gouvernement wallon.

Le dossier de base doit définir le périmètre concerné, examiner les alternatives, proposer des compensations, d’éventuelles prescriptions ou un plan d’expropriation. Conformément à l’article D.II.44, alinéa 1, 10°, spécifiquement pour la définition d’une ZEC, ce dossier de base doit reposer sur une justification solide de la conformité de la zone à l’article D.II.45, §5 et comprendre une carte d’affectation des sols (D.II.44, al.2), à une valeur indicative.

Aucun agrément n’est requis (le dossier de base peut donc être mené par les services communaux). Par contre, la procédure requiert, par la suite, l’élaboration d’un Rapport sur les Incidences Environnementales (RIE) pour lequel un double agrément est nécessaire (et que SEN5 possède). Une subvention peut être accordée par le Ministre (dans les limites de crédits disponibles) pour la réalisation du dossier de base (Art. R1.12-1), mais également du RIE.

La question des compensations

En ce qui concerne les compensations, selon le principe de proportionnalité (art.D.II.45, §3), si une révision du plan de secteur vise à modifier une zone non urbanisable en une zone destinée à l’urbanisation susceptible d’avoir des incidences non négligeables sur l’environnement, alors elle doit intégrer une compensation : il s’agit soit d’une modification équivalente d’une zone existante (destinée à l’urbanisation ou ZACC) ou d’une compensation alternative définie par le Gouvernement.

L’une des particularités de la procédure liée à la ZEC est que le CoDT facilite la question des compensations : en effet, l’article D.II.45, §5 prévoit l’absence de compensation pour, au maximum, 10 % du périmètre de la ZEC, pour autant que les terrains concernés répondent aux deux conditions suivantes :

  1. Qu’ils soient enclavés ou contigües à des parties de la ZEC initialement inscrites en zones urbanisables et
  2. Que leur inclusion soit justifiée eu égard aux objectifs de développement du potentiel de centralité).

Concrètement, prenons à titre d’exemple un périmètre de ZEC qui intègre 45 ha de zones destinées à l’urbanisation. Conformément à l’article D.II.45,§5, 10 % de cette superficie soit 4,5 ha sont exempts de compensation pour autant, bien sûr, qu’ils répondent aux critères ci-dessus. Ainsi :

  • si le périmètre de ZEC représente un total de 47 ha (dont 2 ha de zones non urbanisables), aucune compensation n’est due puisque la zone concernée est en-dessous des 4,5 ha ;
  • si le périmètre de ZEC représente un total de 55 ha, sur les 10 ha de zones non urbanisables, seuls 5,5 ha devront être compensés.

Quand choisir l’outil ZEC ?

L’inscription d’une ZEC n’est pas opportune pour tous les projets. Dans certains cas, les outils SOL (Schéma d’Orientation Local) ou SAR (Site à Réaménager) ou une révision ‘classique’ du plan de secteur s’avéreront plus pertinentes.

L’utilisation ou non de cet outil nécessite de prendre en considération les aspects suivants :

  • Situation : l’objectif principal de la ZEC est la dynamisation des centralités, urbaines et rurales. Elle ouvre une série d’opportunités de développement et de (re)structuration de pôles. Elle ne peut donc pas s’envisager sur des terrains excentrés.
  • Stratégie : la ZEC est un outil de stratégie communale. Une fois la ZEC inscrite au plan de secteur, le Collège communal est le seul à statuer, sans avis du fonctionnaire délégué, pour les permis conformes à la carte d’affectation des sols.
  • Procédure : une révision du plan de secteur, comme le nécessite l’inscription d’une ZEC, est une démarche longue et complexe.

Avec la Déclaration de Politique Régionale, le Gouvernement a exprimé son ambition pour le territoire de limiter la consommation de terres non artificialisées à 6 km²/an (soit +/- la moitié du rythme actuel). Le Ministre a, à de nombreuses reprises, désigné la ZEC comme outil d’opérationnalisation de cette ambition. Va-t-on voir, sous son impulsion, un développement de projets de ZEC dans le courant 2020 ? Ce sera sûrement l’objet de discussions du groupe d’experts « artificialisation » mis en place le 20 février dernier et chargé de faire rapport au Ministre d’une trajectoire à adopter pour réduire l’artificialisation du territoire wallon.